Trouble anormal de voisinage et assurance dégât des eaux : double enseignement à tirer l’arrêt du 16/03/22

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Les acquéreurs d’une maison sont responsables, des troubles anormaux de voisinage causés au fonds voisin, même si ces troubles ont débuté bien avant leur achat. Par ailleurs, les clauses d’exclusion de garantie des contrats d’assurance doivent être formelles et limitées. 


Notion de trouble anormal de voisinage

 « Nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ou encore excédant les inconvénients normaux du voisinage ». Principe exposé dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 27 novembre 1844 à propos des fumées d’une usine qui incommodaient le voisinage. 

Cela peut concerner le bruit, les odeurs, les fumées, les vibrations, une privation ou une diminution de l’ensoleillement ou encore de la vue et bien sûr un risque de dommage ou un dommage comme c’est le cas ici. 


Rappel des faits, objet de l’arrêt de la Cour de Cassation du 16 mars 2022: 

Les Consorts Z sont propriétaires d’un pavillon. 

Le 26 janvier 2007, le pavillon voisin de celui des consorts Z est vendu par les Consorts G à Monsieur et Madame F, assurés à compter de cette date, auprès de la compagnie d’assurance A.

Le 3 mars 2007, Madame Z déclare à son assureur un sinistre dégâts des eaux dans son pavillon. 

Puis elle assigne, sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage, Monsieur et Madame F ainsi que les précédents propriétaires (les consorts G) et la compagnie d’assurance A, en réalisation des travaux rendus nécessaires par les infiltrations et en paiement de dommages-intérêts.

Monsieur et Madame F appellent en garantie les consorts G et la compagnie d’assurance A.


1) Acquéreurs et trouble anormal de voisinage


Monsieur et Madame F font grief à l’arrêt de la Cour d’Appel de les déclarer seuls responsables, sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage, des désordres. 

Monsieur et Madame F font valoir que le vendeur est responsable du trouble anormal de voisinage causé par l’immeuble vendu avant la cession dans la mesure où le trouble anormal de voisinage trouvait sa cause dans des conduites fuyardes dont les premiers désordres remontaient à 1997 et 2005, à une époque où les consorts G étaient propriétaires du bien en sorte qu’ils devaient nécessairement assumer une part du dommage ainsi causé. 

Réponse de la Cour de Cassation : L’action fondée sur un trouble anormal du voisinage est une action en responsabilité civile extra-contractuelle qui, indépendamment de toute faute, permet à la victime de demander réparation au propriétaire de l’immeuble à l’origine du trouble, responsable de plein droit.

« Ayant constaté que le trouble subsistait alors que Monsieur et Madame F étaient devenus propriétaires du fonds à l’origine des désordres, la cour d’appel en a exactement déduit que leur responsabilité devait être retenue, peu important qu’ils n’aient pas été propriétaires de ce fonds au moment où les infiltrations avaient commencé à se produire. »

Il s’agit d’un rappel de jurisprudence. 


2) Clause d’exclusion de garantie des contrats d’assurance


Pour écarter la garantie de la compagnie d’assurance A, l’arrêt de la Cour d’Appel retient deux arguments : 

  • le fait dommageable est antérieur au 25 janvier 2007, date de prise d’effet de l’assurance multirisques habitation, puisque les premiers désordres datent de 1997. 

La Cour de Cassation écarte cet argument au motif que dans les assurances « dégâts des eaux », l’assureur est tenu à garantie, dès lors que le sinistre est survenu pendant la période de validité du contrat d’assurance.


  • Les conditions générales du contrat d’assurance prévoyaient que le contrat ne couvrait pas les dommages provenant d’une canalisation enterrée chez l’assuré. 

La Cour de Cassation écarte cet argument en rappelant que l’article L112-4 du Code des assurances dispose que les clauses des polices édictant des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents et que l’article L113-1 du même Code prévoit que les clauses d’exclusion de garantie doivent être formelles et limitées. La Compagnie d’assurance aurait dû faire mentionner explicitement et précisément dans les conditions particulières les exclusions de garanties. 


Sources :

Arrêt de la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation du 16 mars 2022

Article L112-4 du Code des assurances

Article L113-1 du Code des assurances

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